Philosophie
Le mot
philosophie (du
grec ancien φιλοσοφία, composé de
φιλεῖν, « aimer » et
σοφία, « la
sagesse, le
savoir », c'est-à-dire littéralement : « l'amour de la sagesse ») désigne une activité et une discipline existant depuis l'
Antiquité
et se présentant comme un questionnement, une interprétation et une
réflexion sur le monde et l'existence humaine, ou encore comme un
savoir systématique. Différents buts peuvent lui être attribués, de la
recherche de la
vérité, et de la méditation sur le
bien et le
beau,
à celle du sens de la vie, et du bonheur, mais elle consiste plus
largement dans l'exercice systématique de la pensée et de la réflexion.
Ancrée dès ses origines dans le
dialogue
et le débat d'idées, la philosophie peut également se concevoir comme
une activité d'analyse, de définition, de création ou de méditation sur
des
concepts.
À la différence des
sciences naturelles, des
sciences formelles et des
sciences humaines,
auxquelles elle est intimement liée par son histoire, la philosophie ne
se donne pas un objet d'étude particulier et unique. On trouve
toutefois au sein de la philosophie des domaines d'étude distincts,
tels la
logique, l'
éthique, la
métaphysique, la
philosophie politique et la
théorie de la connaissance. D'autres disciplines se sont jointes, dans l'histoire, à ces branches fondamentales de la philosophie, comme l'
esthétique, la
philosophie du droit, la
philosophie des sciences (appelée aussi
épistémologie), la
philosophie de l'esprit, l'
anthropologie philosophique, ou la
philosophie du langage.
Étymologiquement, «
philosophia » n’est pas une construction moderne à partir du grec
[1], mais bien un mot de la langue grecque elle-même, depuis l'Antiquité. Les termes φιλόσοφος (
philosophos) et φιλοσοφεῖν (
philosophein) apparaissent en quelques occurrences chez les penseurs
présocratiques[2] Héraclite,
Antiphon,
Gorgias et
Pythagore, mais aussi chez d'autres penseurs contemporains de
Socrate, comme
Thucydide ou
Hérodote. D'après un écho d’
Héraclide du Pont,
Pythagore serait d'ailleurs le premier penseur grec à s’être qualifié lui-même de « philosophe »
[3]. Toutefois, c'est la pratique qu'en fait
Socrate, dans les
dialogues de Platon
(où l'on trouve un usage abondant du mot), qui fixera le type de
recherche et de questionnement en quoi consiste encore aujourd'hui la
philosophie
[4].
Le terme est composé des mots « ami » (
philos) et « sagesse, savoir » (
sophía),
la « philosophie » signifiant ainsi : « amour de la sagesse » ou
« amour du savoir ». La philosophie est à plusieurs reprises définie
par
Platon comme étant en opposition avec les désirs « humains » :
philo-hèdonos (amour du plaisir),
philo-sómatos (amour du corps), ou
philo-nikos
(amour de la victoire). Pour lui, elle s'exerce plutôt dans la partie
« plus qu'humaine » des êtres humains, c'est-à-dire dans une pratique
purement intellectuelle, et elle est synonyme de φιλομαθια (
philomathia) : « amour de la connaissance »
[5].
Par ailleurs, elle est une tension vers un savoir ou une sagesse que
l'on ne possède pas, et en ce sens elle relève d'un désir permanent :
ainsi, Socrate, lors de son procès rapporté dans l'
Apologie de Socrate, affirme être « ami de la sagesse », et non pas « sage »
[6].
C'est ce qui l'amène à trouver dans sa condamnation à mort une chance
ultime de séparation de son corps (proprement humain) et de son âme
(proprement intellectuelle), cette âme pouvant alors peut-être
contempler le savoir après la mort (voir
Phédon).
- « Désir de connaître et amour du savoir, ou philosophie, c'est bien une même chose ? » (Platon, La République, II, 376b).
Définir la philosophie ?[modifier]
Paul Gauguin,
D'où venons-nous ? Qui sommes-nous ? Où allons-nous ? (1897/98).
La philosophie contemporaine, issue d'une tradition multiple, se présente sous des formes variées :
tradition herméneutique et postkantienne en Allemagne,
philosophie analytique dans les pays anglophones et dans une grande partie de l'Europe, tradition
phénoménologique en Europe continentale
[7]. Certains remettent fortement en cause la tradition philosophique et ses présupposés telle la
philosophie féministe, la
déconstruction de
Derrida ou de
Heidegger.
Ces courants forment autant de pratiques différentes et d'opinions
divergentes sur la nature de la philosophie, qui interdisent de donner
une définition unique acceptable par tous. S'il y a aujourd'hui
plusieurs traditions philosophiques, aucune ne peut prétendre résumer
l'activité philosophique à elle seule, ni décrire l'activité
philosophique de façon consensuelle.
Les difficultés à définir la philosophie sont en outre de nature
épistémologique,
car il est difficile de délimiter rigoureusement méthodes, thèmes et
objets de la philosophie. Historiquement, elle a pu en effet s'inspirer
d'autres disciplines (des mathématiques, voire des
sciences positives).
Pourtant, elle n'a jamais réussi à développer une méthode ou un
ensemble de méthodes qui auraient réussi à s´imposer parmi les
philosophes (comme la méthode expérimentale s'est imposée en physique
et en chimie par exemple). En outre les amalgames entre la philosophie
et d'autres disciplines sont de plus favorisés par une tradition de
philosophes aux intérêts très divers. Ainsi
Aristote
aura été aussi bien logicien, que philosophe ou naturaliste. Déterminer
le philosophe par sa fonction sociale n'est donc pas aisé. La plupart
des activités autrefois appartenant à la discipline sont devenues
aujourd'hui autonomes (psychologie, sciences naturelles, etc.), et la
part propre de la philosophie s'est réduite.
Mais il est également délicat de déterminer l'essence de la
philosophie, soit parce que son statut dans la société est lui-même
difficile à cerner, soit qu'elle a été ramenée à d'autres disciplines
apparemment proches. Dès l'Antiquité, par exemple, Socrate était
confondu dans
Les Nuées d'
Aristophane
avec les sophistes, que Platon nous présente pourtant comme ses
adversaires dans ses dialogues. Et même sans tomber dans un quelconque
pathos du philosophe incompris par ses contemporains, on peut se
demander quelle est sa fonction dans la société. En tant que discipline
théorique, son intérêt semble limité parce qu'elle est sans portée
pratique et sans fondements scientifiques. En tant que recherche de la
sagesse, elle s'adresse à l'individu plus qu'à la communauté.
Les méthodes de la philosophie[modifier]
On peut dans une première approche, délimiter
ex negativo un certain nombre de méthodes et de principes
heuristiques qui caractérisent au moins en partie la philosophie.
Délimitations négatives de la méthode de la philosophie[modifier]
D'une part la philosophie ne recourt pas à la méthode expérimentale.
La philosophie, en effet, à la différence de la physique, de la chimie
ou de la biologie, n'a jamais vraiment intégré le processus
d’expérimentation dans son outillage
heuristique.
Ceci est évident pour la philosophie antique et médiévale qui ne
connaissait pas l'expérimentation. Même les grands philosophes qui se
sont illustrés comme scientifiques (
Descartes,
Pascal,
Leibniz
pour ne citer qu'eux) ont toujours distingué leur travail dans le
domaine scientifique et dans le domaine philosophique. Certains
philosophes comme
Kant ou
Wittgenstein[8]
ont même vu dans l’absence d’expérimentation en philosophie une
caractéristique épistémologique essentielle de cette discipline et ont
refusé toute confusion avec les sciences expérimentales
[9].
D’autre part la philosophie n'est pas, par essence, une science
reposant sur l'observation empirique à la différence de la sociologie
ou des sciences politiques par exemple. Il ne faut naturellement pas
croire que la philosophie peut ignorer les données empiriques les plus
évidentes. Mais traditionnellement la philosophie ne veut pas se
limiter à un simple catalogue de faits et entreprend pour cela un vrai
travail de théorisation voire de spéculation. Ainsi, par exemple, même
si
Aristote a recueilli les constitutions des cités grecques de l'époque, il a voulu dans
La Politique et dans l’
Éthique à Nicomaque analyser les structures de la cité d'un point de vue théorique.
Enfin, la philosophie, à la différence des mathématiques ou de la
logique formelle, ne s’est jamais décidée à travailler uniquement au
moyen de symboles formels, bien que Leibniz ait pu rêver résoudre les
problèmes philosophiques au moyen d’un calcul logique universel
[10].
Et si la philosophie analytique contemporaine est impensable sans la
logique mathématique, elle utilise encore massivement le langage
naturel.
Caractéristiques de la méthode de la philosophie[modifier]
Malgré les difficultés que comporte cette entreprise, il est
possible de distinguer certaines grandes caractéristiques positives de
la méthode philosophique. La philosophie se comprend comme un travail
critique. C'est une de ses définitions les plus courantes. Cette
critique n’est cependant jamais purement et simplement négative. Elle a
pour but de créer de nouvelles certitudes et de corriger les fausses
évidences, les illusions et erreurs du sens commun ou de la philosophie
elle-même.
Socrate,
par exemple, interrogeait ses contemporains et les Sophistes afin de
leur montrer leurs contradictions et leur incapacité à justifier ce qui
leur semblait évident
[11]. Descartes
[12]
est à l'époque moderne le meilleur représentant de cette conception de
la philosophie, car, selon lui, seul un doute radical et général
pouvait être le fondement d'une pensée parfaitement rigoureuse et
indubitable.
La philosophie est souvent caractérisée comme un travail sur les
concepts et notions, un travail de création de concepts permettant de
comprendre le réel, de distinguer les objets les uns des autres et de
les
analyser, mais aussi un travail d'analyse des concepts et de leurs ambiguïtés
[13]. Elle a très tôt
[14]
reconnu les problèmes que posent les ambiguïtés du langage. De nos
jours la philosophie analytique donne elle aussi une grande place à ce
problème.
En outre, à la différence des
sciences,
la délimitation des méthodes et du domaine de la philosophie fait
partie de la philosophie elle-même. Chaque penseur se doit d'indiquer
quels problèmes il souhaite éclairer, et quelle sera la méthode la plus
adaptée pour résoudre ces problèmes. Il faut en effet bien voir qu'il y
a une unité profonde des problèmes philosophiques et de la méthode
philosophique. Il ne faut donc pas voir l'instabilité des méthodes et
des thèmes philosophiques comme une faiblesse de la discipline, mais
plutôt comme un trait caractéristique de sa nature. Ainsi, la
philosophie est une sorte de retour critique, du savoir sur lui-même,
ou plus précisément une critique rationnelle de tous les savoirs (
opinions,
croyances,
art, réflexions scientifiques, etc.), y compris philosophiques -
puisque réfléchir sur le rôle de la philosophie c'est entamer une
réflexion philosophique.
[15]
Adorno et
Horkheimer : deux représentants de la critique marxiste de la rationalité moderne.
Enfin, la philosophie est une discipline déductive et rationnelle. Elle n'est pas simple
intuition ou impression
subjective, mais demeure inséparable de la volonté de démontrer par des arguments et
déductions ce qu’elle avance : elle est volonté de rationalité. C'est même la rupture des
présocratiques
avec la pensée religieuse (mythologie) de leur époque, et leur rapport
aux dieux grecs qui est considérée traditionnellement comme le point
marquant de la naissance de la philosophie. Ce souci de démontrer et de
livrer une argumentation se retrouve au cours de toute l'histoire de la
philosophie. Qu'on songe aux discussions
éristiques durant l'
Antiquité,
à l'intérêt que portent les philosophes à la logique depuis Aristote,
mais aussi, au Moyen Âge, au souci de donner à la philosophie la
rigueur démonstrative des mathématiques (comme chez Descartes ou
Spinoza) ou à l'importance qu'accorde la
philosophie analytique
de nos jours à la rigueur et à la clarté argumentatives. Malgré cette
tendance profonde, la philosophie contemporaine a vu se développer une
critique radicale de la raison, que ce soit chez
Nietzsche,
Heidegger, ou encore
Adorno : la rationalité même s'est donc trouvée mise en débat par la philosophie
[16].
La méthode est un ensemble de prescriptions relatives au déroulement
optimal d'une activité. Cette dernière peut être soit une pratique
collective assez complexe, comme la gestion de la communauté politique
(« méthode démocratique »), soit la résolution d'un problème théorique
spécifique («
méthode diagonale de Cantor », «
méthode des tables sémantiques »). Le concept de méthode est historiquement lié au problème de l'acquisition de la certitude dans le champ
cognitif.
Pour Socrate, l'activité qui vise la connaissance est, comme tout autre
art obligée de se conformer à certaines règles. Dans les dialogues
platoniciens,
Socrate
semble pleinement conscient du rapport qui existe entre la validité
d'une connaissance et la modalité de son acquisition : c'est d'ailleurs
là l'essence de toute position qui reconnaît à la méthode une
importance prédominante. La
maïeutique
de Socrate ainsi que la méthode dialectique dans les diverses
présentations qu'on peut en donner à partir des dialogues platoniciens
sont des procédures visant à éviter l'erreur dans l'analyse des
concepts, et tout particulièrement la forme d'erreur qui réside dans
l'acceptation tacite ou inconsciente des préjugés et des présupposés.
La philosophie comme mode de vie[modifier]
Jean-Léon Gérôme,
Diogène, 1860. Portrait romantique qui représente aussi le chien (en grec « κύων ») qui a donné son nom au
cynisme.
La philosophie s’est comprise très tôt comme une manière de vivre et
non pas uniquement comme une réflexion théorique. Dit autrement : être
philosophe, c’est aussi vivre et agir d’une certaine façon et non pas seulement se confronter à des questions abstraites
[17].
L’étymologie du terme « philosophie » indique bien que le philosophe
est celui qui tend vers la sagesse, qui cherche à vivre comme il faut
et plus particulièrement qui recherche le bonheur. La philosophie
entendue comme mode de vie met l'accent sur la mise en application dans
sa propre vie des résultats de la réflexion philosophique. L’idée que
la philosophie est une manière de vivre a aussi pu amener certains
philosophes à imaginer que, pour cette raison, ils devaient guider les
autres et les aider à mener correctement leurs existences. La
philosophie, d’éthique personnelle, pouvait se faire projet collectif
voire politique. Ces ambitions « collectives » de la philosophie
prennent différentes formes. Une véritable communauté de vie pouvait se
constituer autour d'un philosophe. Ceci explique en partie la naissance
dans l’Antiquité d’écoles philosophiques (autour d’Épicure, de Platon
ou d’Aristote par exemple). Depuis les présocratiques et surtout à
partir de Socrate, toute une tradition a défendu cette conception de la
philosophie comme un mode de vie. Citons entre autres les
Stoïciens[18], Platon, Aristote, Épicure, Descartes
[19], Spinoza
[20],
Sartre ou
Russell.
Mais ces derniers sont loin d’exclure l’idée que le philosophe
s’intéresse à des problèmes théoriques. La « sagesse », ou plus
exactement la
sophia, que veut posséder le philosophe est aussi
un savoir et une connaissance. Le philosophe, dans la lignée de la
tradition fondée par Socrate, sait comment il doit vivre ; il peut
justifier ses choix et son mode de vie. Socrate par exemple, dans les
dialogues présocratiques de Platon, exige de ses interlocuteurs qu’ils
soient à même de donner le
logos
de leur jugement de valeur et de leur choix, c’est-à-dire de les
justifier rationnellement. Cette exigence de rationalité peut amener
même à donner des fondements authentiquement scientifiques à la
philosophie. Bien sûr la définition de la philosophie en tant que
modus vivendi
ne peut prétendre être suffisante pour définir la philosophie dans son
ensemble. Bien des philosophes ont compris la philosophie comme un
travail intellectuel et non comme un mode de vie : c'est le cas de
manière claire dans le monde universitaire et de la recherche de nos
jours. Il en va tout autrement, en Inde notamment. Le point de vue
occidental ne peut s'appliquer aux concepts philosophiques en vigueur
dans cette partie du monde, bien qu'il y eût tentative d'assimilation à
l'époque romaine, en particulier avec
Plotin. L'on sait que lors des conquêtes d'
Alexandre le Grand (vers -325), les Grecs furent frappés par l'ascétisme hindou et le dénuement qui en résultait
[21]. D'où leur appellation, fausse, de « gymnosophistes » (de
gumno,
« nu »). Ces ascètes pratiquaient les préceptes des Upanishads. À cette
confrontation d'idées philosophiques intervient l'ethnophilosophie.
Philosophie et société[modifier]
Au fil du temps les rapports entre la société et les philosophes ont
pu varier énormément mais de manière générale on peut déterminer trois
types de rapports. D’une part les rapports entre la société et les
philosophes sont parfois caractérisés par une violente attitude de
rejet, car il est courant que la philosophie se démarque. Méfiante
vis-à-vis des traditions, critique envers toute forme de préjugés, la
philosophie n'a pas manqué de connaître des heurts plus ou moins durs
avec la société. Quelques dates symboliques sont à retenir :
- en 432 avant J.-C. : Anaxagore est chassé d'Athènes sous le coup d'une accusation d'athéisme ;
- en 399 avant J.-C. : Socrate est condamné à mort sous les chefs d'accusation de corruption des mœurs de la jeunesse et d'impiété ;
- En 529 après J.-C., l'empereur chrétien Justinien
fait interdire l'enseignement de la philosophie (païenne) à Athènes.
C'est à cette date que les philosophes grecs vont se réfugier en Syrie
et au Liban, où certaines œuvres philosophiques seront traduites en
arabe par des traducteurs travaillant pour les premiers califes Abbassides[22].
- les années 1188-1189 : le sultan Abû Yûsuf Yaqûb Al-Mansûr fait interdire la philosophie, les études et les livres au Maroc et en Espagne. Averroès et son œuvre sont visés ;
- le 17 février 1600 : Giordano Bruno est supplicié sur le bûcher pour son rejet de la transsubstantiation, de la trinité, son blasphème contre le Christ, sa négation de la virginité de Marie ;
- le 7 février 1752 : En France, l'Encyclopédie de Diderot est censurée, car elle mettait en cause les fondements idéologiques de la société de l'époque ;
- le 16 mai 1849 : Karl Marx est expulsé de Cologne après la Révolution allemande de 1848 pour articles séditieux.
Mais d’autre part, paradoxalement, la philosophie a aussi réussi à
s'institutionnaliser. L'existence d'universités où elle est enseignée,
de sociétés érudites philosophiques (comme la
Kant-Gesellschaft), ou de concours prestigieux comme l'
agrégation
en France le prouvent clairement. Les dirigeants peuvent alors prendre
conseil auprès des philosophes et s'inspirer de principes
philosophiques tels les despotes éclairés du
XVIIIe siècle[23].
Enfin, la philosophie peut considérer qu'elle doit développer
théoriquement un projet politique que soit les philosophes (comme chez
Platon), soit le chef d'un État (selon
Machiavel[24]), soit les masses elles-mêmes (
Marx[25])
devraient mettre en place. L’exemple le plus classique des ambitions
politiques de la philosophie reste naturellement Platon et sa célèbre
République, dans laquelle il esquisse une véritable
utopie politique rompant radicalement avec les modes traditionnels de pensée et d'action. Dans un autre contexte,
Russell et
Sartre tenaient la philosophie pour inséparable de l'engagement politique
[26].
Philosophie et histoire de la philosophie[modifier]
Représentation de la sagesse (1635) : « Sapiens Dominabitur Astris ».
Traduction libre du texte : « Qui acquiert la sagesse sera maître des
astres. ».
Si la philosophie a une longue histoire, il convient de distinguer
la pratique de la philosophie de l'étude simple des doctrines passées.
Parfois atténuée, voire effacée, cette distinction est pourtant
cruciale. Nombre de penseurs en appellent aux philosophies antérieures
pour les appuyer, s'en inspirer, ou encore les critiquer : il y a là un
appel à l'histoire et à un fond culturel commun, mais ça ne fait pas de
la philosophie une discipline historique. La pratique philosophique
n'étant pas uniquement une glose sur la philosophie des époques
précédentes, il faut la distinguer de l'
histoire de la philosophie.
L’histoire de la philosophie consiste à tenter de reconstruire, de comprendre, d’interpréter, voire de critiquer, les positions et thèses de penseurs comme
Platon,
Thomas d’Aquin,
Hegel,
etc. Il s'agit moins d'évaluer la pertinence philosophique ou l'intérêt
actuel de ces philosophes que de savoir ce qu'ils ont vraiment dit, et
de restituer leurs pensées dans leurs contextes d'apparition. Ce
travail d'étude porte également sur des courants philosophiques (le
scepticisme antique, le
néokantisme), ou des questions débattues au cours de l’histoire (le
dualisme de l’âme et du corps, la
querelle des universaux) appartiennent elles aussi à l’histoire de la philosophie.
La philosophie, prise comme activité, a pour but d’étudier et
de répondre à des questions relevant d’un problème, d’un domaine ou
branche de la philosophie. Il va sans dire que cette pratique amène
constamment à se référer aux philosophes antérieurs, mais le rapport à
l'histoire est ici différent de celui qu'aurait l'historien de la
philosophie. Dans un tel cas, le philosophe ne vise pas à savoir ce
qu'untel a pensé, il cherche à réintégrer cette pensée dans son
argumentation personnelle, il instrumentalise les philosophies
précédentes pour justifier sa pensée et faire apparaître son point de
vue propre. L'essence de cette pratique est de répondre à des
problèmes, à des questions, en utilisant si besoin l'histoire de la
philosophie. Nous nous tournerons d’abord vers cette approche de la
philosophie avant de livrer un exposé de l’histoire de la philosophie.
Les branches de la philosophie[modifier]
La philosophie est loin d’être un domaine de connaissances bien
délimité au sens où les problèmes auxquels elle se confronte sont d’une
extrême variété. Elle étudie de nombreux objets, certains proches,
c'est pourquoi sa subdivision en différentes branches est problématique
et relève de l'arbitraire. De plus, si des pans entiers de la
philosophie sont apparus au
XXe siècle,
certains domaines se sont détachés très nettement de la philosophie à
l'époque moderne. La physique, par exemple, était considérée comme
appartenant à la philosophie jusqu’au
XVIIIe siècle. Mais le détachement n'est pas toujours aussi net ; ainsi la
science politique,
considérée comme une ancienne branche de la philosophie devenue
autonome, entretient un dialogue permanent avec la philosophie
politique (qui n'est donc pas morte). De même, la biologie, qui a
longtemps été entravée par son appartenance à la philosophie avec les
thèses
finalistes,
mécanistes, et
vitalistes, revient par une porte dérobée. En effet, à l'aube du
XXIe siècle le développement des
biotechnologies a pour corolaire l'apparition d'un nouveau champ d'étude philosophique : la
bioéthique.
Malgré ces difficultés, les branches suivantes se distinguent
aujourd'hui car chacune a un objet propre bien délimité qu'elle soumet
à des questionnements spécifiques (et notamment ceux indiqués ici) :
- la métaphysique
et ses diverses branches (« Y a-t-il des réalités immatérielles ? »,
« Dieu existe-il ? », « L'âme est-elle immortelle ? Incorporelle ? »)
- l'ontologie,
rattachée ou non à la métaphysique selon les interprètes (« Qu'est-ce
que l'être ? », « Pourquoi y a-t-il de l'être plutôt que rien ? »)
- la philosophie de la religion,
partiellement rattachée à la métaphysique puisqu'elle tente de définir
le divin et pose la question de l'existence de Dieu, qu'elle double
d'une interrogation sur la nature du sacré en général.
- la morale ou l' éthique :
discipline pratique et normative permettant de définir la meilleure
conduite pour chaque situation: (« Quelle est la fin des actions
humaines ? », « Le bien et le mal sont-ils des valeurs universelles
permettant de définir cette fin ? »).
- la philosophie politique
(« D'où peut provenir la légitimité du pouvoir ? », « Quel est le
meilleur régime politique ? » « La morale peut-elle et doit-elle guider
l'action politique ? »)
- la philosophie du droit
(« Quelles sont les relations entre Droit et Justice ? », « Comment
naissent les normes judiciaires ? », « Selon quels critères faut-il les
juger ? »)
- la gnoséologie ou théorie de la connaissance (« D'où provient la connaissance ? », « Qu'est-ce que la vérité ? »)
- l'esthétique (« Qu'est-ce que le beau ? », « Qu'est-ce que l'art ? »)
- la philosophie de l'esprit (« Quelles sont les relations entre corps et esprit ? », « Comment fonctionne la cognition ? »)
- la philosophie de la logique
- la philosophie de l'action (« La Liberté est-elle illusoire ? »)
- la philosophie de l'histoire (« L'histoire est-elle régie par des lois, une nécessité, ou est-elle le fruit absurde de la contingence ? »)
- la philosophie du langage
(« Quelle est l'origine du langage ? », « En quoi le langage se
distingue-t-il d'autres systèmes de communications ? », « Quelles
relations entretiennent langage et pensée ? »)
- l'épistémologie qui est littéralement un discours sur la connaissance (ou encore sur la science dans une acception restreinte assez courante) et rejoint dans ce sens la gnoséologie ou théorie de la connaissance, tout en se référant également à la méthodologie et aux philosophies du langage et de l'action.
La plupart des grandes pensées philosophiques débordent de leur
domaine originel, et tentent d'apporter des réponses à plusieurs
problèmes philosophiques.
Frise chronologique[modifier]

Histoire de la philosophie occidentale[modifier]
Quelques philosophes importants de la zone européenne selon leur lieu de naissance.
Philosophie antique[modifier]
Période grecque[modifier]
La philosophie grecque a connu trois grandes périodes
[27] :
L'École d'Athènes (détail d'une fresque de
Raphaël), représentant les différentes écoles de l'Antiquité grecque : on reconnaît, au centre,
Platon montrant le ciel du doigt (allusion à sa
Théorie des Idées) et
Aristote montrant la terre (allusion à son souci d'ancrer la philosophie dans la connaissance des faits
empiriques).
La philosophie grecque se caractérise par le fait qu'elle est dominée par l'
éthique, par la question « comment bien vivre ? » et plus particulièrement par celles de la
vertu et du
bonheur.
L'importance de ce thème apparaît évidente à la lecture des dialogues
de Platon, des textes d'Aristote, des Stoïciens ou d'Épicure. La
conséquence de cette tendance est que la philosophie était comprise
comme une façon de vivre et non pas uniquement comme un discours
théorique (même si ce dernier ne saurait être ignoré, naturellement) ce
qui est particulièrement frappant chez un
Socrate, un
Diogène ou chez les Stoïciens.
Les deux autres grands domaines de la recherche des penseurs antiques sont d'une part la
cosmologie et la physique (ce qu'on a longtemps nommé
philosophie naturelle), d'autre part la
théorie de la connaissance parfois liée à la
logique.
Ainsi, la question fondamentale qui occupait les philosophes
présocratiques était la question du principe de toute chose. Au travers
d'un mélange d'observations empiriques et de spéculations, ils
tentèrent de comprendre la nature et ses phénomènes. Ainsi le premier
philosophe connu,
Thalès, tenait l'eau pour le principe de toute chose. Platon dans le
Timée
(livre dont l'influence fut primordiale au cours de l'histoire de la
philosophie) cherche lui aussi à expliquer la naissance du monde, et
imagine un
démiurge qui aurait créé notre univers. Enfin,
la Physique d'Aristote, tout comme la
lettre à Hérodote d'Épicure ou la physique stoïcienne montrent le vif intérêt des anciens pour la connaissance de la nature (φυσις,
physis).
La
théorie de la connaissance et la
logique
étaient elles aussi essentielles pour les philosophes de l'Antiquité.
Les Sophistes défendent souvent une thèse qu'on peut qualifier de
relativiste car elle revient à nier l'existence d'une connaissance
objective et universellement valable. « Rien n'est vrai (en soi). Pour
chacun la chose apparaît, telle qu'elle apparaît, selon les
circonstances et l'environnement »
[28].
Tel est le sens de la célèbre formule : l'homme est la mesure de toute
chose. Platon, à la suite de Socrate qui affirmait l'existence d'une
science objective des valeurs et des normes morales, développe une
théorie de la connaissance explicitée dans
la République et le
Théétète. Platon fait en effet la distinction entre la simple opinion (ou
doxa,
empirique et sans fondement) et le véritable savoir philosophique, qui
ne peut être acquis que par un long parcours d'apprentissage des
mathématiques, de la dialectique et de ce qu'on appelle la
théorie des Idées[29].
Épicure, quant à lui, développe toute une théorie empiriste de la
connaissance afin de déterminer les critères que doit remplir une
connaissance pour être vraie. Enfin, aussi bien Aristote que les
Stoïciens ont fondé une logique formelle, sous la forme,
respectivement, de la
syllogistique et d'une
logique des propositions.
Période romaine et de l'Antiquité tardive[modifier]
Les Romains, dominant petit à petit le contour de la mer Méditerranée (la
Mare nostrum),
s'approprient ensuite l'héritage grec des différents courants
philosophiques. Certains auteurs romains nous ont légué à travers le
temps des principes et concepts de philosophie qui aujourd'hui manquent
par faute de textes originaux ou de copies. Il en va ainsi de
Lucrèce (
Ier siècle av. J.-C.), avec son chef d'œuvre poétique
De rerum natura,
explicitant l'épicurisme (seules trois lettres d'Épicure nous sont
parvenues), malgré le rejet de la poésie par les Épicuriens. Il est
fort probable qu'il ait pu avoir en sa possession (ou du moins devant
ses yeux) des manuscrits aujourd'hui perdus. Nous devons à
Cicéron,
lui aussi philosophe d'importance (il est le premier à rédiger des
ouvrages philosophiques en latin ; on ne peut le rattacher à aucune
école, l'homme faisant preuve d'
éclectisme), d'avoir sauvé le poème de Lucrèce.
Les Stoïciens sont représentés par deux hommes symbolisant le pouvoir :
Sénèque (
Ier siècle) et
Marc Aurèle (
IIe siècle). Le premier de ces deux personnages est célèbre d'une part de sa proximité (qui lui sera mortelle) avec l'empereur
Néron,
d'autre part parce qu'il est considéré comme le plus complet
représentant du stoïcisme (bien que s'en émancipant), notamment par
l'entremise de ses œuvres, à savoir deux de ses Dialogues (
De Brevitate vitæ,
De la brièveté de la vie ;
De Vita beata,
Sur la vie heureuse). Le second Stoïcien est Marc Aurèle, empereur romain. Influencé par
Épictète, il développe dans son fameux
Pensées à moi-même les plus hautes valeurs qui doivent relever de l'être humain :
sagesse,
justice,
courage et
tempérance.
Le
néoplatonisme, mouvement fondé par
Plotin (
IIIe siècle), voulait concilier la philosophie de Platon avec des idées conceptuelles de l'Égypte et de l'Inde
[30].
Il y eut deux phases concernant le néoplatonisme durant l'Antiquité, et
une autre plus locale lors de la Renaissance. De consonance bien plus
mystique que les Idées platoniques, Plotin voit la philosophie comme un
cheminement de l'âme vers le principe de transcendance du Bien, donnant
pour but à ce système, l'union avec le principe premier, originel,
Dieu.
Augustin d'Hippone, ou saint Augustin (
IVe siècle), personnage le plus important pour la propagation du christianisme après
saint Paul,
laisse une abondante trace écrite qui sera d'une influence décisive sur
le devenir de l'Occident, et de ce point de vue, sur de nombreux
philosophes et théologiens. Sa pensée, l'
augustinisme (nommée ainsi après sa mort), consacre l'idéalisme platonicien.
Philosophie médiévale[modifier]
La philosophie médiévale d'Occident et du Proche Orient sont issues
du même courant. Ce sont les penseurs musulmans et chrétiens, puis
entre musulmans eux-mêmes, qui en cherchant des arguments convaincants
vont faire appel à la philosophie antique. Du Moyen Orient,
principalement musulman, vont naître plusieurs écoles de pensée et de
méthode qui seront reprises plus tard en Occident, alors que les
sociétés musulmanes finiront par étouffer les idées originales nées
durant cette période.
La philosophie médiévale en Occident est caractérisée par la
rencontre du Christianisme et de la philosophie. La philosophie
médiévale est une philosophie chrétienne, à la fois dans son intention
et par ses représentants qui sont presque tous des
clercs.
Un thème fondamental constant est à partir de là aussi le rapport entre
la foi et la raison. Mais ceci ne signifie pas que la pensée se
manifeste désormais selon une unité dogmatique. Le conflit des
directions philosophiques entre elles d'une part et les condamnations
de thèses par les autorités ecclésiastiques d'autre part, montrent bien
que la pensée se déploie sur des voies très autonomes et divergentes.
Malgré sa grande diversité et sa longue période de développement,
elle se manifeste cependant une certaine unité dans la présentation des
questions philosophiques : discussion des auteurs du passé,
confrontation avec les
Saintes Écritures et les textes des
Pères de l'Église, afin d'examiner toutes les facettes d'un même problème, dont à la fin l'auteur proposait la résolution.
La première période coïncide avec l'Antiquité : la
Patristique (du
IIe au
VIIe siècle environ) est caractérisée par les efforts des Pères de l'Église (
patres)
pour édifier la doctrine chrétienne à l'aide de la philosophie antique,
et de l'assurer ainsi à la fois contre le paganisme et contre la
gnose. Le représentant de la philosophie chrétienne le plus important et ayant eu le plus d'influence dans l'Antiquité est
saint Augustin. Son œuvre, influencée par le néoplatonisme, est une des principales sources de la pensée médiévale.
Après la fin de l'Antiquité (la date symbolique de 529 apr. J.-C., marque la fermeture de l'académie platonicienne ordonnée par
Justinien),
les textes transmis sont, durant des siècles, conservés et recopiés
dans les monastères. Pourtant, paradoxalement, la pensée philosophique
perd son autonomie et sa force propre.
La période qui s'ouvre à partir du
IXe siècle est appelée généralement la
scolastique. L'appellation de
Scolastiques (
scola
équivaut à école) désignent ceux qui s'occupent scolairement des
sciences, et particulièrement les professeurs qui travaillent dans les
écoles des diocèses ou de la cour fondée par
Charlemagne,
et plus tard, dans les Universités. Mais avec le terme de scolastique,
c'est avant tout une méthode qui est évoquée. Les questions sont
examinées et résolues rationnellement suivant le pour et le contre. Ce
qui caractérise la scolastique, c'est un retour aux textes anciens,
leur analyse critique et leur message.
Les Universités, fondées à partir du
XIIe siècle,
deviennent le centre de la vie intellectuelle. Le développement du
savoir dans les quatre facultés fondamentales suivantes : philosophie (
Septem artes liberales),
théologie, droit, et médecine. Les « Disputationes » qui ont lieu dans
les Universités suivaient le strict schéma de la méthode scolastique. À
la fin, sa sclérose formelle, fut le point de départ de la critique qui
se réalisa à la Renaissance contre cette forme de philosophie. Les
sources antiques auxquelles s'abreuve la scolastique sont avant tout :
saint Augustin ; la tradition néoplatonicienne (avec ici les écrits
d'un auteur inconnu qui se nomme
Denys l'Aréopagite) ;
Boèce qui transmet la logique aristotélicienne ; plus tard, l'ensemble des textes d'
Aristote.
On distingue les périodes suivantes :
- au cours de la première scolastique (XIe au XIIe siècle) débute l'élaboration de la méthode proprement scolastique. À ce moment se propage la querelle des Universaux
qui est aussi le thème du siècle suivant. La question est de savoir si,
à toutes les déterminations universelles (genres et espèces, par
exemple l'homme)
correspond une réalité indépendante de la pensée, ou si elles
n'existent que dans la pensée en soi. L'influence du monde arabe est
très importante pour le développement futur de la philosophie. Dans les
années 800-1200, la culture islamique a permis la transmission de la
philosophie et de la science grecques. C'est de cette manière qu'une
plus grande partie d'écrits que celle dont disposait le Moyen Âge chrétien devint accessible. Ce fut le cas des œuvres complètes d'Aristote.
- la nouvelle réception d'Aristote imprègne l'image de la haute scolastique (environ XIIe au XIIIe siècle).
Aucun penseur ne parvient à une connaissance complète des principes
d'Aristote. C'est sur ce point que s'opposent la pensée franciscaine,
orientée vers l'Augustinisme, et la pensée aristotélicienne des
dominicains. Thomas d'Aquin
a repris la vaste entreprise systématique visant à l'union de
l'aristotélisme et de la pensée chrétienne. Le caractère antinomique de
certains enseignements d'Aristote avec le dogme chrétien conduisit, de
la part de l'Église, à une interdiction temporaire de certains écrits
et à la condamnation d'un série de thèses philosophiques. Avec Maître Eckhart,
la tradition de la mystique médiévale parvint à son apogée ; il s'agit
de la voie vers la contemplation intérieure et de l'union avec le divin.
- les représentants plus lointains sont Henri Suses, Jean Tauler et Jean Gerson dans la scolastique tardive (XIVe siècle), qui s'impose avec Guillaume d'Occam et la critique des systèmes métaphysiques des anciennes écoles (via antiqua). La nouvelle voie (via moderna, appelée aussi le nominalisme) va de pair avec un épanouissement des sciences naturelles (Nicolas d'Oresme, Jean Buridan) (Atlas de la philosophie, Livre de poche).
Philosophie islamique[modifier]
Les sources de la philosophie islamique proviennent à la fois de l'
islam en lui-même (
Coran et
Sunna) ainsi que de la philosophie grecque, iranienne préislamique et indienne.
C'est en cherchant à affiner la doctrine de l'islam et à interpréter correctement les
hadiths,
tout en extrapolant sur les questions religieuses qui n'avaient pas été
explicitement tranchées dans le Coran, que naît la méthode de l'
ijtihad. Avec elle s'ouvrent les premiers débats philosophiques et théologiques en islam, notamment entre les partisans du
libre arbitre ou
Qadar (de l'
arabe :
qadara, qui a le pouvoir), et les djabarites (de
djabar : force, contrainte), partisans du
fatalisme.
La
théologie en islam doit répondre à des interrogations concernant la
théodicée, l'
eschatologie, l'
anthropologie, la
théologie négative et la
religion comparée. Plusieurs courants philosophiques existent en terre d'islam :
La
Madhhab motazilite est née d'une opposition aux vues traditionnelles des musulmans partisans du
califat.
Puis, s'intéressant aux attaques que subissait l'islam de la part des
non-musulmans, ces Motazilistes devinrent rapidement obsédés par le
débat avec les autres théologies et courants de pensée à l'intérieur de
l'islam lui-même.
Le calife
Al-Mamun fait du motazilisme la doctrine officielle en
827 et crée la
Maison de la sagesse en
832. Très rapidement, la philosophie grecque est introduite dans les milieux intellectuels persans et arabes. L'
École péripatétique commence à avoir des représentants parmi eux : ce fut le cas d'
Al-Kindi, d'
Al-Farabi, d'Ibn Sina (
Avicenne), et d'Ibn Rushd (
Averroès).
Ceux qui cherchaient par une démonstration philosophique à conforter
et démontrer le bien-fondé de leur foi religieuse ont été recrutés par
Hunayn ibn Ishaq, un
arabe chrétien qui dirige la
maison de la sagesse dans les
années 870.
Ils ont collecté, traduit et synthétisé tout ce que le génie des autres
cultures grecque, indienne, perse ont pu produire avant d'entreprendre
les commentaires sur ces œuvres. C'est ce travail qui forme les bases
de la philosophie musulmane du
IXe et
Xe siècle. Ceux qui utiliseront cette méthode dite
Ilm-al-Kalâm basée sur la
dialectique grecque seront appelés
mutakalamin. En réponse au
motazilisme,
Abu al-Hasan al-Ash'ari, initialement un motaziliste lui-même, développe le Kalâm et fonde l'école de pensée
acharite qui s'appuie sur cette méthode. Ainsi le kalâm et la falsafa influenceront plusieurs
madhhabs.
Sous le califat des
Abbassides, un certain nombre de
penseurs et de scientifiques,
et parmi eux de nombreux musulmans non-sunnites ou des non-musulmans
(en particulier des lettrés chrétiens syriaques, ceux-ci les ayant
auparavant traduits du grec en syriaque, puis en arabe
[31]),
jouent un rôle dans la transmission à l'Occident des savoirs grec,
indien, et d'autres sagesses préislamiques, mésopotamiennes et perses.
Trois penseurs spéculatifs, les deux Persans
al-Farabi et
Avicenne, et l'Arabe
al-Kindi, combinent l'
aristotélisme et le
néoplatonisme
avec d'autres courants dans l'Islam. Ils furent considérés par beaucoup
comme déviants par rapport à l'orthodoxie religieuse, et certains les
jugèrent même comme des philosophes non-musulmans.
Les
Ismaéliens ne sont pas à l'écart de l'influence de la philosophie
néoplatonicienne et plusieurs penseurs collaborent pour produire à
Basra une encyclopédie : la
Ikhwan al-Safa.
Le
XIIe siècle
voit l'apothéose de la philosophie pure et le déclin du Kalâm. Cette
suprême exaltation de la philosophie doit être attribuée, pour une
large part au Persan
Al-Ghazali et au Juif
Juda Halevi.
En émettant des critiques, ils ont produit par réaction un courant
favorable à la philosophie par une mise en cause des concepts et en
rendant leurs théories plus logiques et plus claires.
Ibn Bajjah et
Averroès
ont produit les plus belles œuvres de la pensée islamique. Averroès
clôt le débat par son œuvre d'une grande hardiesse. La fureur des
orthodoxes
est en effet telle que le débat n'est plus possible. Les orthodoxes
s'en prennent sans distinction à tous les philosophes et font brûler
les livres. Le débat se poursuivra, mais en Occident, par
l'intermédiaire des Juifs.
D'aucuns considèrent
Ibn Khaldoun comme le dernier grand penseur de ce temps philosophique islamique ; il vécut au
XIVe siècle. Il fut avec son grand-œuvre
Al-Muqqadima (en particulier sa brillante introduction) en avance sur son époque et l'inventeur de la
sociologie.
Philosophie chrétienne[modifier]
La philosophie trône parmi les sept arts libéraux — illustration extraite de l'
Hortus deliciarum de Herrad von Landsberg (
XIIe siècle).
Souvent caricaturée et décriée, la
philosophie médiévale
s'étend sur la vaste période qui sépare la philosophie antique tardive
de la philosophie moderne. Bien loin de se résumer à l'image négative
qu'a aujourd'hui la
scolastique, elle présente toute une variété de penseurs d'inspirations sensiblement différentes
[32].
D'une part le Moyen Âge est une des périodes les plus fécondes en ce
qui concerne la logique. Certaines lois logiques ont été connues dès le
Moyen Âge (par exemple
Pierre d'Espagne connaissait déjà ce qu'on appellera plus tard la
loi de De Morgan)
avant d'être ensuite oubliées. C'est surtout la philosophie de la
logique qui connut un développement important. Les penseurs médiévaux
se concentrèrent plus particulièrement sur la célèbre
Querelles des Universaux, dont le point de départ fut une remise en cause de la
théorie des Idées platoniciennes. Elle fut animée entre autres par
Abélard,
Albert le Grand et
Guillaume d'Occam.
D'autre part le Moyen Âge fut aussi un âge de redécouverte de la philosophie antique à partir du
XIe siècle[33]. La traduction en latin du corpus aristotélicien modifiera ensuite grandement la donne, et contribuera à réaffirmer
Aristote
comme l'un des philosophes les plus influents de l'histoire. Mais cette
redécouverte ne sera possible que par l'intermédiaire des
Syriaques
de la Mésopotamie et de la Syrie, désireux de s'instruire et souhaitant
qu'ils servent à l'exégèse des textes religieux. Les conquérants arabes
se virent remettre les ouvrages traduits, ce qui permit le passage des
œuvres en Occident
[34]. La tradition de commentaire des textes est aussi très présente : le commentaire des
Sentences de
Pierre Lombard sera pour longtemps un exercice canonique de l'époque. Quant aux commentaires d'Aristote par saint
Thomas d'Aquin, au
XIIIe siècle, ceux-ci feront longtemps autorité et constitueront un modèle du genre.
Enfin, la philosophie médiévale est très liée à l'
Église,
et les réflexions philosophiques ont souvent un fond religieux et
théologique plus ou moins prégnant. Les philosophes du Moyen Âge, qui
avaient tous reçu une formation en
théologie,
se basaient sur les textes bibliques et tentaient souvent de concilier
les enseignements de la Bible avec les écrits des philosophes antiques.
Cette réconciliation prit la forme d'une subordination de la
philosophie à la théologie, ou plutôt d'une complémentarité, les
Vérités révélées des
Écritures primant sur la « lumière naturelle » de la
Raison,
l'une n'allant jamais contre l'autre. La grande synthèse de la foi et
de la raison, c'est-à-dire d'Aristote, de la théologie et de la
Révélation fut réalisée au
XIIIe siècle, notamment par des penseurs comme Thomas d'Aquin.
Philosophie juive[modifier]
Deux réactions eurent lieu chez les Juifs face à la philosophie
grecque : alors que les Juifs restés en Judée se rebellaient contre
l'hellénisation, d'autres s'installaient en terre grecque, à
Alexandrie, et produisaient des penseurs qui, à l'exemple de
Philon, n'hésitaient pas à confronter les deux langages.
Représentant typique du judaïsme hellénisé d'Alexandrie, Philon ne parle probablement pas l'
hébreu.
Il rêve de concilier religion et philosophie, révélation et raison : la
philosophie est le moyen de défendre et de justifier les vérités
révélées du Judaïsme. Celles-ci sont pour lui fixées et déterminées, et
la philosophie permet d'en approcher.
La
Bible est pour lui un ouvrage de législation religieuse parsemé de leçons d'éthique,
Moïse un précurseur de
Solon ou
Lycurgue, les commandements bibliques inculquent à l'
homme les fondements du
stoïcisme, et accordent son rythme aux rythmes cosmiques et universels. Le
Shabbat vise à abolir toute barrière sociale, la
casheroute à enseigner la modération et la frugalité.
Il fallut l'expansion du monde de l'Islam pour que la philosophie
revienne frapper en force aux portes du monde juif. Elle avait
désormais un tout autre visage :
- d'un côté, les Mutazilites s'en faisaient un outil afin d'étudier rationnellement les Textes sacrés ;
- de l'autre côté, le néoplatonisme avait été adapté puis adopté :
l'émanationnisme, la perfection infinie de l'Un, la montée de l'âme,
etc., sont des thèmes très proches des croyances religieuses,
permettant de s'essayer à la fois à la spéculation rationnelle et à la
spéculation mystique.
L'un des penseurs les plus marquants du Judaïsme,
Juda Halevi,
se leva alors pour combattre la philosophie. Cependant, Juda Halevi ne
cessa de se « mouvoir dans l'univers mental de ses adversaires » pour
les contrer, alors que son contemporain,
Abraham ibn Dawd Halevi tentait d'introduire ses contemporains aux idées
Aristote.
L'aristotélisme trouva son représentant dans le géant de la philosophie juive,
Maïmonide.
Il changea littéralement le champ de vision du Judaïsme. Il fut
l'« Aigle de la Synagogue », qui écrivit le Commentaire sur la
Mishna et le
Mishné Torah, le « Prince des Médecins » et surtout un des plus grands érudits que connut le Judaïsme. Auteur du
Guide des Égarés dont le but est de résoudre la difficulté qui se présente à l’esprit d’un
juif croyant, concurremment nourri de réalités philosophiques, Maïmonide a réussi à expliquer les
anthropomorphismes bibliques,
à dégager la signification spirituelle cachée derrière les
significations littérales et à montrer que le spirituel était la sphère
du divin.
L’Humanisme est un courant de pensée qui apparaît pendant la
Renaissance. Il consiste à valoriser l’
Homme,
à le placer au centre de son univers. Dans cette optique, le principe
de base de cette théorie est que l’Homme est en possession de capacités
intellectuelles potentiellement illimitées. La quête du savoir et la
maîtrise des diverses disciplines sont nécessaires au bon usage de ces
facultés. Il prône la vulgarisation de tous les savoirs, même
religieux : pour certains humanistes, la parole divine doit être
accessible à toute personne, quelles que soient ses origines, sa langue
(traduction de la Bible par
Érasme en
1516) ou sa catégorie sociale.
Ainsi, cet Humanisme vise à lutter contre l’ignorance, et à diffuser
plus clairement le patrimoine culturel, y compris le message religieux.
Cependant l’individu, correctement instruit, reste libre et pleinement
responsable de ses actes dans la croyance de son choix. Les notions de
liberté (ce que l'on appelle le « libre arbitre »), de tolérance,
d’indépendance, d’ouverture et de curiosité sont de ce fait
indissociables de la théorie humaniste classique. L'Humanisme désigne
toute pensée qui met au premier plan de ses préoccupations le
développement des qualités essentielles de l'être humain.
La liste des philosophes d'inspiration humaniste comprend aussi bien
Pétrarque que
Léonard de Vinci,
Montaigne,
Thomas Jefferson ou encore
Albert Schweitzer ; ceci pour indiquer la longue portée, jusqu'à nos jours, de ce courant philosophique.
Philosophie moderne[modifier]
Par « philosophie moderne », il faut entendre les courants
philosophiques qui se développent au cours de ce que les historiens
appellent l'
Époque moderne (
1492-
1789).
Elle est, d'une part, l’héritière de la pensée antique en bien des points.
Spinoza,
Descartes,
Leibniz ou
Hume
(pour ne citer qu'eux) sont loin d'avoir rompu tout lien avec la
philosophie des Anciens. Ils les connaissaient parfaitement et leur ont
notamment emprunté leur vocabulaire. Mais d'autre part, les Modernes
ont souvent compris leur propre travail comme une amélioration de ce
que les philosophes de l'Antiquité avaient déjà accompli, ce qui les
conduisit parfois à s'opposer à ces derniers.
Cette tentative « d'améliorer » la philosophie antique apparaît clairement dans la
philosophie politique, une des grandes caractéristiques de la philosophie moderne étant en effet d'avoir renouvelé celle-ci.
Machiavel ou
Hobbes ont tous deux voulu fonder la
philosophie politique
comme science, en la séparant nettement de l'éthique (alors que cette
dernière et la politique étaient inséparables chez les trois grands
penseurs de l’Antiquité qu'étaient Socrate, Platon et Aristote). En
outre, aussi bien Spinoza et Hobbes que Machiavel ont cherché à fonder
la philosophie politique sur l'étude de l'homme tel qu'il
est — et non de ce qu'il
devrait être comme le faisaient les Anciens.
Mais la philosophie moderne, au sens où nous l'avons délimitée, comprend aussi, dès la fin du
XVIIe siècle, la philosophie des
Lumières et le
libéralisme :
Locke,
Rousseau,
Diderot,
Voltaire entre autres. Le mot « philosophe » y prend le sens nouveau de « membre du
parti philosophique » au fur et à mesure que se dessine une philosophie politique qui privilégie la
démocratie, la
tolérance et la
souveraineté du peuple, que ce soit dans le
Traité théologico-politique de Spinoza, le
contrat social de Rousseau ou dans les deux
traités du gouvernement civil de Locke.
L'autre grande caractéristique de la philosophie moderne est
l'importance qu'y joue la science, même s'il faut remarquer que la
philosophie du
XVIIe siècle privilégie plutôt les mathématiques et la physique (mécaniste), alors que les philosophes du
XVIIIe siècle
se tournent davantage vers la biologie. Les penseurs menaient en effet
souvent une carrière de savant, ou nourrissaient en tout cas un vif
intérêt pour la science.
Leibniz et
Descartes, notamment, étaient de grands savants, de même qu'un siècle plus tard
Diderot développa des réflexions annonçant le
transformisme. Du point de vue de la méthode, la philosophie s'inspire alors soit des mathématiques (tels Descartes et
Spinoza), soit de la physique (
Hobbes) ;
ou bien elle tente de fonder une méthode applicable à tous les domaines
du savoir : philosophie, physique, mathématiques, etc., par exemple
pour Leibniz. La méthode de la philosophie s'inspire donc souvent de
celle des sciences ou des mathématiques.
Enfin, en ce qui concerne la
théorie de la connaissance, il est traditionnel de distinguer deux grands courants : le
rationalisme (avec Descartes, Leibniz et Spinoza) et l'
empirisme
(Hume et Locke). De façon très schématique, les rationalistes affirment
l'existence d’une connaissance indépendante de l'expérience, purement
intellectuelle, universellement valable et indubitable. Les empiristes,
eux, affirment que toute connaissance procède de l'
induction et de l'expérience sensible. Ce sont souvent aussi des
sceptiques
(par exemple Hume) qui affirment qu'il n'existe aucune connaissance
universellement valable, mais seulement des jugements nés de
l'induction et que l'expérience pourra réfuter.
Kant
défend une position originale dans cette discussion. Il affirme en
effet à la fois la nécessité de l'expérience mais aussi des concepts et
des formes de la sensibilité
a priori pour la constitution de
la connaissance. Sa thèse combine donc à la fois l'empirisme et le
rationalisme. Kant, qui nie à la différence des rationalistes la
possibilité d'une connaissance ne reposant pas sur l'expérience,
distingue par la suite les choses en soi (connus sans le recours de
l'empirie) et les choses pour nous (telles que nous les connaissons).
Les premières sont inconnaissables pour nous : Dieu, la liberté et
l'âme.
Philosophie contemporaine[modifier]
Adolph von Menzel,
Le laminoir en fer (1872/75). La
révolution industrielle
provoqua une révolution dans les conditions de vie qui devait amener un
bouleversement de la pensée philosophique, économique et politique.
La philosophie du
XIXe siècle
se divise en des directions si différentes qu'elles ne se laissent pas
ramener à un seul et unique concept. Elle comprend la philosophie
romantique, l'
Idéalisme allemand, le
positivisme, la pensée socialiste et matérialiste de
Marx,
Feuerbach ou
Proudhon, le
pragmatisme ainsi que nombre de penseurs difficiles à classer tels
Schopenhauer,
Nietzsche et
Kierkegaard ou encore plus tard
Chestov.
Une partie de la philosophie et surtout de la philosophie allemande
se comprend comme un dialogue critique mais aussi constructif avec la
pensée kantienne : ce fut le cas de l'
Idéalisme allemand,
de Schopenhauer et de Nietzsche. Le but avoué étant de reprendre ce qui
semblait le plus intéressant dans la philosophie de Kant et de la
débarrasser ce qui semblait être des restes d'une métaphysique dépassée.
Les courants philosophiques marqués par l'empirisme ont pris une autre direction comme le positivisme de
Comte
qui voulait dépasser la pensée métaphysique uniquement au moyen des
sciences empiriques c'est-à-dire sans recourir aux explications
métaphysiques. En Angleterre
Bentham et
Mill développèrent l'
utilitarisme
qui soumettait l'économie et l'éthique à un rigoureux principe de
comparaison des avantages et des inconvénients et qui avec l'idée d'un
bien-être pour tous (le principe du « plus grand bonheur au plus grand
nombre ») joua un rôle fondamental.
L'économie et la philosophie politique furent marquées par
Marx,
Engels ou
Proudhon ou encore
Hume et
Adam Smith.
Les deux premiers voulaient modifier profondément les conditions de vie
des ouvriers par un bouleversement des structures économiques et
politiques de leur époque que les philosophes avaient pour tâche de
conceptualiser.
Il est par contre difficile de classer toute une série de philosophes tels
Schopenhauer,
Kierkegaard et
Nietzsche. Schopenhauer mettait en avant la puissance et la domination de la volonté sur la raison en s'inspirant des
Upanishads, principes philosophiques constituant pour partie la pensée indienne des
Veda,
alors en vogue dans certaines universités européennes. Sa vision du
monde pessimiste, profondément marquée par l'expérience de la
souffrance, témoigne d'une influence védique et de l'idée bouddhiste de
nirvāna.
Nietzsche qui tout comme Schopenhauer accordait une grande importance
aux arts, se désignait lui-même comme un immoraliste. Pour lui les
valeurs de la morale chrétienne traditionnelle étaient l'expression de
faiblesse et d'une pensée décadente. Il analysa les idées de
nihilisme, du
surhomme et de l'éternel retour de la répétition sans fin de l'histoire. Kierkegaard était en bien des points un précurseur de l'
existentialisme. Il défendait une philosophie imprégnée de religion et représentant un
individualisme radical qui dit comment on doit se comporter en tant qu'individu singulier dans les différentes situations concrètes.
La philosophie du
XXe siècle se caractérise elle aussi par une grande richesse de doctrines. La
philosophie analytique, philosophie dominante de la seconde moitié de ce siècle, qui tire ses racines en Allemagne avec
Frege, au Royaume-Uni avec
Russell et
Whitehead, et en
Pologne avec l'
École de Lvov-Varsovie (
Tarski,
Kotarbiński,
Leśniewski,
Łukasiewicz),
est majoritaire dans l'ensemble des pays anglophones et une grande
partie de l'Europe (Autriche, Allemagne, Pologne, Suisse, pays
scandinaves, etc.). Elle se caractérise par un usage important de la
logique mathématique et plus généralement par une très grande attention portée au langage comme source d'illusions, de
paralogismes.
Elle a abouti à une reprise d'ensemble de nombreux problèmes
philosophiques traditionnels tel la nature de l'esprit et ses rapports
au corps (voir
philosophie de l'esprit), les problèmes relatifs à la nature de l'action (voir
philosophie de l'action), l'essence et la fonction du langage naturel et formel (cf. la
philosophie du langage et la
philosophie de la logique). Ses représentants les plus importants sont Russell, Frege, Whitehead, Wittgenstein, Tarski, Leśniewski, Łukasiewicz,
Ajdukiewicz,
Davidson, Kenny,
Austin,
Searle,
Ryle,
Hintikka,
Vuillemin[35].
L'autre grande tradition philosophique est la
phénoménologie de
Husserl dont les successeurs sont
Heidegger,
Sartre,
Merleau-Ponty,
Ingarden,
Stein,
Patočka,
Ricœur ou
Levinas. Pour Husserl, la phénoménologie est la science des
phénomènes, c'est-à-dire la science des
vécus
par opposition aux objets du monde extérieur. Elle aura ainsi pour
objet la connaissance (Husserl), l'imagination (Sartre), la perception
(Merleau-Ponty), l'existence humaine (Heidegger), la volonté (Ricœur).
En outre, elle est une science apriorique, ou
eidétique, à savoir une science qui décrit les essences abstraites des vécus
[36].
L'idée d'absurde est développée par Albert Camus au travers de
plusieurs ouvrages dont un essai philosophique : "Le mythe de
Sisyphe" ; cette pensée atypique dans la philosophie pose la question
du suicide comme question fondamentale avant toute autre et, en
écartant cette éventualité, préconise la révolte comme alternative.
Le début du
XXe siècle marque également le début de la
psychanalyse, avec
Freud, qui éclaircit beaucoup de choses sur la
conception de la pensée.
La psychanalyse fournit un modèle théorique du psychisme, un appareil
psychique, impliquant l'inconscient, ainsi qu'une méthode
d'investigation de ce dernier. Freud dit lui-même de sa discipline
qu'elle constitue la troisième
blessure narcissique
de l'humanité. Il est en outre le seul non-philosophe à pouvoir être
considéré comme l'égal d'un philosophe, au vu de l'immense apport et de
la redéfinition du thème de la sexualité en l'homme.
La philosophie
poststructuraliste et la
déconstruction reposent quant à elles sur la remise en cause de la notion de sujet (
Foucault[37]) ou de sens (
Derrida) et son remplacement par les notions de structure, d'inconscient (
Lacan), de dissémination du sens (Derrida
[38]).
La
philosophie politique au
XXe siècle se caractérise d'une part par l'intérêt qu'elle porta aux phénomènes totalitaires
[39], d'autre part par l'examen et la discussion des
théories du contrat social, développées aux XVII
e et XVIII
e siècles, avec notamment la
théorie de la justice de
Rawls (1971) qui fut abondamment commentée.
Histoire des philosophies asiatiques[modifier]
La philosophie indienne[modifier]
|
Cet article ou cette section doit être recyclé.
Une réorganisation et une clarification du contenu sont nécessaires. Discutez des points à améliorer en page de discussion.
|
Tôt le matin sur le Gange
On définit classiquement deux sortes de
philosophies indiennes : les philosophies
āstika (आस्तिक en devanāgarī), qui suivent les
Veda (
hindouisme...) et les philosophies
nāstika (नास्तिक) que sont le
jaïnisme, le
bouddhisme et le
chârvâka, qui les rejettent. Pour ces dernières, on se reportera aux articles qui les concernent
[40].
Les différentes écoles āstika[modifier]
L'école de
Nyâya (en
sanskrit न्याय, nyāya) de spéculation philosophique est basée sur un texte appelé le Nyâya
Sûtra. Il a été composé par
Gautama Aksapada (à ne pas confondre avec
Siddhârtha Gautama, le fondateur du
bouddhisme), vers le
IVe ou
Ve siècle av. J.-C..
La contribution importante apportée par cette école est sa
méthodologie. Elle est basée sur un système de logique qui a été plus
tard adopté par la plupart des autres écoles indiennes (orthodoxes ou
pas), de la même manière qu'on peut dire que la science, la religion et
la philosophie occidentales sont en grande partie basées sur la logique
aristotélicienne.
Le système de
Vaiçeshika (en
sanskrit वैशेषिक, vaiśeṣika), fondé par la sage
Kanada,
postule un pluralisme atomique. Suivant les préceptes de cette école de
pensée, tous les objets de l'univers physique, les substances
matérielles, sont réductibles à un certain nombre d'atomes, sauf les
cinq substances immatérielles : le temps, l'espace, l'éther (
âkâsha) l'esprit et l'âme. Les atomes constitutifs des substances matérielles sont les atomes de feu, de terre, d'air et d'eau.
Le
Sāṃkhya (
sanskrit en
devanāgarī : सांख्य) est généralement considéré comme le plus vieux des systèmes philosophiques indiens, il aurait été fondé au
VIIe siècle av. J.-C.
par Kapila, ou trois siècles plus tôt, selon A. Daniélou. Il s'agit,
historiquement, de la première description connue du modèle complet de
l'univers, à la fois scientifique et transcendant. Sa philosophie
considère l'univers comme se composant de trois réalités éternelles :
le principe de l'espace (
âkâsha), le principe de l'intelligence (
Puruṣa) et le principe de la nature (
Prakriti).
L'école d'
Uttara Mimamsa (
nouvelle recherche), généralement connue sous le nom de
Vedānta (en
sanskrit वेदअन्त, vedânta), se concentre sur les enseignements philosophiques des
Upanishad
plutôt que sur les injonctions ritualistes des Brâhmanas. Mais il y a
plus de cent Upanishads qui ne forment pas un système unifié. Leur
systématisation a été entreprise par Badarayana, dans un travail appelé
Vedânta Sûtra.
La manière obscure dont les aphorismes des textes du Vedânta sont
rédigés laisse la porte grande ouverte pour une multitude
d'interprétations. Cela a entraîné une prolifération des écoles du
Vedânta. Chacune de ces dernières a interprété à sa façon les textes et
a produit sa propre série de sous-commentaires — tout en prétendant
être seule fidèle à l'original.
Le « Jaïnisme » est une philosophie indienne basée sur la non-violence (
ahimsa) ou respect de toute vie (humaine, animale, végétale) et sur la tolérance (
anekantavada) ou reconnaissance de la multiplicité des points de vue. Il implique trois grands principes que sont :
- la vision juste des réalités (tattvas),
- la conduite juste,
- la connaissance juste.
Son principal grand maître philosophique et spirituel ou
24 ° Tirthankara a été Vardhamana dit
Mahavira (le grand héros) qui a vécu en Inde aux VIe et Ve siècles avant J.-C.
[41].
Le bouddhisme est l’un des grands systèmes de pensée et d’action orientaux, né en
Inde au
VIe siècle av. J.-C.. Il est fondé sur les
Trois Joyaux : les bouddhistes déclarent prendre refuge dans le
Bouddha, le fondateur du bouddhisme, dans le
Dharma, la doctrine du Bouddha, et dans le
Sangha, la communauté des adeptes
[42].
À l’origine, le bouddhisme n’est pas vraiment une philosophie ou une religion, mais une « leçon de choses » (
dhamma en
pali,
dharma en
sanskrit), ce terme désignant à la fois la réalité, sa loi, et son exposé. De plus lorsqu’on parle de
dharmas on désigne diverses lois naturelles particulières.
Les
quatre nobles vérités qui sont à l’origine du bouddhisme sont :
Cependant ces enseignements classiques, et de portée spirituelles
plutôt que philosophiques, ne sont que le point de départ de ce qui
deviendra une riche pluralité de traditions philosophiques et
religieuses. Après tout le bouddhisme avait « conquis » l'ensemble de
l’Asie, du Japon jusqu’à l’Afghanistan, intégrant et/ou s’adaptant à
ces différentes cultures. En philosophie particulièrement, tout le
spectre des positions et options possibles a, à un moment ou l’autre,
été l’objet d’élaborations et de débats. Il a donc connu son «
réalisme », son «
atomisme », son «
nominalisme », etc.
L’hindouisme, dont le bouddhisme est issu, présente lui aussi une telle variété. Pareillement, et à l’instar de la
scolastique
occidentale, toute philosophie s’inscrit dans le cadre de la religion.
Plus précisément, les philosophies bouddhistes ne perdent jamais de vue
les préoccupations
sotériologiques.
Au terme de ce processus historique, il ne subsiste plus que deux
grandes écoles philosophiques, particulièrement dans le bouddhisme dit
du
mahāyāna[43], ce sont le
Cittamātra (
esprit seulement,
rien qu'esprit), et le
Madhyamaka (
voie du milieu).
La philosophie babylonienne[modifier]
|
La pertinence du contenu de cet article est remise en cause. (Merci d'indiquer la date de pose grâce au paramètre date)
Considérez le contenu de cet article avec précaution. Discutez-en ou améliorez-le !
|
La philosophie
babylonienne prend ses racines dans une
sagesse mésopotamienne en avance sur son temps, laquelle incarne certaines philosophies de vie, en particulier la
morale. Ces
modus vivendi mésopotamiens rejaillissent à travers la religion mésopotamienne ainsi que dans la littérature babylonienne (la
dialectique, le
dialogue, l'
épopée, le
folklore, les
hymnes, les paroles de chansons, la
prose et les
proverbes).
Ces diverses formes de littérature ont dans un premier temps été
classées par les Babyloniens, et leur raisonnement et rationalité
(logos) développés au-delà de la simple observation
empirique.
Le
Manuel des diagnostics médical d'Esagil-kin-apli rédigé au
XIe siècle
avant notre ère fut basé sur un ensemble logique d'axiomes et
d'hypothèses, y compris la vision moderne que grâce au contrôle et à un
examen des symptômes du patient, il est possible de déterminer sa
maladie, l'étiologie de celle-ci, le développement futur et les chances
de recouvrement de la santé du patient.
Dès les
VIIIe et
VIIe
siècles avant J.-C., les astronomes babyloniens commencèrent à étudier
la philosophie à partir d'un idéal naturel de l'univers, de même qu'ils
ébauchèrent une logique interne au sein de leur système prophétique
planétaire. Ceci constitue une contribution d'importance à la
philosophie des sciences.
Il est possible que la philosophie babylonienne ait eu une influence sur les Grecs, en particulier pendant la
période hellénistique. Le texte babylonien
Le dialogue du pessimisme contient des similitudes avec la pensée
agonistique des
Sophistes,
la doctrine des contrastes de Héraclite et les dialogues de Platon, et
peut également se poser en précurseur de la maïeutique chère à Socrate.
À ce propos,
Thalès de Milet est connu pour avoir étudié en Mésopotamie.
La philosophie perse[modifier]
Il existe d'antiques relations entre les
Veda indiennes et les
Avesta
mèdes. Les deux principales familles philosophiques traditionnelles
indo-iraniennes étaient déterminées par deux différences
fondamentales : dans leurs implications sur la position de l'être
humain dans la société et leur vision du rôle de l'homme dans
l'univers. La première charte des droits de l'homme par
Cyrus II (dit aussi Cyrus le Grand) est vu comme un reflet des questions et pensées exprimées par
Zarathoustra, et développées dans les écoles de pensée zoroastriennes.
- Le zoroastrisme dérive du nom de Zoroastre déformé par les Grecs
aux dépens du véritable nom, Zarathoustra. Son autre appellation, le
mazdéisme, dérive quant à lui du nom du dieu vénéré, Ahura Mazdā. Ce
courant de pensée fut fondée au cours du Ier millénaire av. J.-C..
- Le manichéisme est une religion syncrétique apparue au IIe siècle de notre ère, dont le nom provient de son fondateur, Mani.
- Le mazdakisme est un courant religieux fondée au Ve siècle. Il doit son nom à son fondateur, Mazdak.
La philosophie chinoise[modifier]
|
Cet article ou cette section doit être recyclé.
Une réorganisation et une clarification du contenu sont nécessaires. Discutez des points à améliorer en page de discussion.
|
La philosophie
chinoise
diffère radicalement de la philosophie grecque, tellement que l'on peut
s'interroger sur l'association des termes de l'expression « philosophie
chinoise ». Dès l'origine les chemins divergent, se rejoignant
seulement au
XXe siècle : les formes linguistiques sont très différentes (la linguistique chinoise n'est pas basée sur le
logos,
au contraire du grec ancien) ; la pensée chinoise s'appuie plus
volontiers sur l'analyse que sur la synthèse ; sur la résolution des
problèmes que sur la définition des concepts ; sur l'exemplarité que
sur la démonstration ; sur la fluidité de l'esprit que sur la solidité
des arguments.
La pensée chinoise est donc intéressante dans le sens où elle nous
permet de découvrir des entrées originales, inconnues pour la
philosophie occidentale.
Le confucianisme[modifier]
Le
confucianisme
est la voie principale de la philosophie chinoise et n'a connu que de
rares mises à l'écart. Toute éducation se fondait en premier lieu sur
les livres formant le « Canon confucianiste » : dont le
Shi Jing ou
Livre des Poèmes, le
Yi Jing ou
Livre des Mutations, les
Annales de Lu, les
Entretiens de Confucius et le livre de
Mencius.
Presque toute la production savante en Chine peut s'interpréter comme
une suite de commentaires sur ces œuvres vénérées comme étant l'essence
de l'esprit chinois. Presque tous les mouvements de pensée
confucianiste se présentaient comme ayant renoué avec la vraie pensée
du Sage. Entre les « réalistes » comme
Xun Zi et les partisans de son pendant « idéaliste »
Mencius, plus tard entre
Wang Yangming et
Zhu Xi,
des tendances ont émergé et débattu de la pensée du Maître,
enrichissant la philosophie de nouveaux concepts et de nouvelles
interprétations. C'est la lignée de
Mencius que
Zhu Xi
va privilégier et ses commentaires seront ceux considérés comme
orthodoxes, c'est-à-dire comme références, par les examinateurs
impériaux des dynasties Ming et Qing (la dernière).
Le néo-confucianisme[modifier]
Le néo-confucianisme désigne un développement tardif et éloigné du
confucianisme, mais possède des racines autres que celle du
confucianisme. Il commença son développement sous la dynastie des
Song et parvint à sa plus grande expansion sous celle des
Ming. On en retrouve des traces dès la dynastie des
Tang.
Ce courant de pensée eut une grande influence en Orient,
particulièrement en Chine, au Japon et en Corée. Zhu Xi est considéré
comme le plus grand maître néo-confucianiste des Song, tandis que Wang
Yangming est le plus fameux des maîtres professant sous les Ming. Mais
il existe des conflits entre les écoles de ces deux penseurs.
道
dào « la Voie »,
calligraphie 草書
câoshū « herbes folles », un style très libre influencé par le taoïsme.
Le taoïsme, une religion, une philosophie
[44]?
Le terme « taoïsme » recouvre des textes, des auteurs, des croyances
et pratiques, et même des phénomènes historiques qui ont pu se réclamer
les uns des autres, répartis sur 2 500 ans d’histoire.
La catégorie « Taoïsme » est née sous la dynastie Han (
200 av. J.-C. à
200), bien après la rédaction des premiers textes, du besoin de classer les fonds des bibliothèques princières et impériales.
Dào jiā (道家) ou
dào jiào (道教), « école taoïste », distingue à l’époque une des écoles philosophiques de la période des Royaumes combattants (
500 av. J.-C. à
220 av. J.-C.). École est ici à entendre dans son sens grec, voire
pythagoricien,
d’une communauté de pensée s’adonnant aussi à une vie philosophique ;
n'y voir qu’un courant intellectuel est un anachronisme moderne. Mais
cette école ne fut sans doute que virtuelle, car ses auteurs, dans la
mesure où ils ont vraiment existé, ne se connaissaient pas forcément,
et certains textes sont attribués à différentes écoles selon les
catalogues.
Durant la période des
Trois Royaumes (
220-
265), les termes
dào jiā (道家) et
dào jiào
(道教) divergent, le premier désignant la philosophie et le second la
religion. Car la catégorie a vite englobé des croyances et pratiques
religieuses d’origine diverse : « ... le taoïsme n’a jamais été une
religion unifiée et a constamment été une combinaison d’enseignements
fondés sur des révélations originelles diverses [...] il ne peut être
saisi que dans ses manifestations concrètes »
[45].
Le taoïsme est-il une philosophie ou une religion ? Les deux, peut-on dire. Sont évoquées les conceptions antiques du
Zhuangzi (
Tchouang Tseu) et du
Dao De Jing (
Tao Te King), car ces textes continuent d’inspirer la pensée chinoise, ainsi que l’Occident, avec des thèmes comme le
Dao,
la critique de la pensée dualiste, de la technique, de la morale ; dans
un éloge de la nature et de la liberté. On trouvera aussi un exposé sur
les pratiques taoïstes, concentré sur le
Moyen Âge chinois (les six dynasties, 200-
400). La période permet de révéler des techniques
mystiques, des idées médicales, une
alchimie, des
rites
collectifs. Leur élaboration a commencé bien avant et s’est poursuivie
ensuite, mais ce moment permet d’en offrir un tableau plus riche, et
plus attesté. Il en résulte un panorama large, fondé sur des textes et
des commentaires récents, afin que chacun puisse se faire
son idée du taoïsme comme cela se fit par le passé, mais en privilégiant les sources les plus significatives, les plus évocatrices.
Xuanxue 玄學,
Hsuan Hsue ou néo-taoïsme désigne un
courant de pensée philosophique et culturel chinois. Celui-ci s'est
créé lors du démantèlement de l'empire
Han, au
IIIe siècle de notre ère. Les philosophes de ce courant ont développé une interprétation métaphysique cohérente du
Dao De Jing, du
Zhuangzi et du
Yi Jing, dans laquelle le
dao, identifié au
wu
(rien ou vide), est l’origine ontologique de toutes choses. Leurs
commentaires et éditions ont vite fait autorité et exercé une influence
déterminante sur la façon dont ces ouvrages seront interprétés par les
générations ultérieures.
Sa composante culturelle essentielle est le
qingtan (« pure
conversation »), sorte de joute oratoire codifiée dont les thèmes,
souvent philosophiques, évitaient les sujets brûlants de la politique
contemporaine. À cette pratique était associé un style de vie
individualiste, hédoniste et anti-conformiste.
Les Cent Écoles[modifier]
Sous cette désignation, on retrouve quantité de doctrines, avec, entre autres :
- le légisme de Shang Yang ou Han Fei Zi, qui est une doctrine purement politique, très autoritaire, ressemblant fort au totalitarisme.
- le moïsme ou mohisme, fondé par Mo Zi (Mo-tseu), né en réaction au confucianisme.
- l'École des Noms, ou des Logiciens, s'intéresse au langage et aux relations logiques qu'il décrit, dans le but de convaincre.
La philosophie japonaise[modifier]
La philosophie japonaise (en
japonais 日本哲学,
Nihon tetsugaku) se situe dans le prolongement de la philosophie chinoise, le plus généralement par l'importation,
via la
Corée,
de la culture chinoise durant le Moyen Âge. Le Japon s'est en effet
approprié le Bouddhisme et le Confucianisme. La religion traditionnelle
nippone, le
Shintoïsme,
est entrée en dialogue avec ces différentes traditions importées. Pour
cette religion il existe des divinités ou esprits, appelés
Kami
神, qui se retrouvent dans tout objet naturel (chute d'eau, arbre...),
phénomène naturel (arc-en-ciel, typhon...), objet sacré... On peut
mettre en parallèle les
huacas incas pour mieux cerner ce que représentent les Kami.
Les
budō 武道 (
bu, la guerre ;
do, la voie) sont des arts martiaux (
judo,
karaté,
aïkido) d'inspiration bouddhiste zen.
La philosophie coréenne[modifier]
|
La pertinence du contenu de cet article est remise en cause. (Merci d'indiquer la date de pose grâce au paramètre date)
Considérez le contenu de cet article avec précaution. Discutez-en ou améliorez-le !
|
Il existe une histoire continue de la philosophie en
Corée,
qui remonte à il y a plus de deux mille ans. La philosophie coréenne
traditionnelle se focalise sur la totalité de la vision du monde. La
satisfaction affective du
chamanisme comme elle est représentée dans le manuel chinois
Yi Jing en fait également partie. Les
chamans en Corée sont principalement des femmes (appelées
mudang 무당) et quelquefois des hommes (
paksu).
Le confucianisme est également arrivé très tôt, approximativement autour du IV
e siècle. Ce mouvement
n'est pas
au départ une religion pour les Coréens, mais une philosophie.
Confucius (공자) fait figure de philosophe. Cependant, petit à petit le
confucianisme et le bouddhisme s'imposent dans le royaume ; si le
confucianisme devient même religion officielle à partir du XIV
e siècle
[46], très peu de monde aujourd'hui s'en revendique.
Deux exemples pratiques appliquées à la philosophie coréenne sont le
Han Mu Do (littéralement, « la voie des arts martiaux coréens ») ainsi que le
Viet vo dao (
Việt : le peuple vietnamien ;
Võ : l'art martial ;
Đạo : la voie).
La philosophie africaine[modifier]
L'expression pose un problème du même acabit que celui constaté avec
l'expression « philosophie chinoise ». Il est utilisé de différentes
manières par différents philosophes. Bien qu'une majorité de
philosophes
africains
étudient dans des domaines tels que la métaphysique, l'épistémologie,
la morale et la philosophie politique, une question qui accapare nombre
d'entre eux se situe sur la nature de la philosophie africaine
elle-même. Un des points centraux du désaccord est sur le terme
« africain » : désigne-t-il le contenu de la philosophie ou l'identité
des philosophes ?
Notes et références[modifier]
- ↑ R. Bödéus, "philosophía", in (dir.) JACOB, André, Encyclopédie philosophique universelle, vol. 2 : Les notions philosophiqe, tome 2, Paris, PUF.
- ↑ ALQUIÉ,F., Signification de la philosophie, Paris, 1971.
- ↑ Héraclide du Pont, fragment 88.
- ↑ Monique Dixsaut, Le naturel philosophe. Essai sur les dialogues de Platon, p. 9.
- ↑ Platon, La République, II, 376b.
- ↑ Le sage est celui qui possède la sagesse, l'ami est celui qui la désire. Platon écrit dans le Phèdre (278d) que, pour parler proprement, seul un dieu possède la sagesse.
- ↑ Sur l'opposition entre philosophie continentale et analytique voir un texte de Pascal Engel : petits déjeuners continentaux et goûters analytiques [archive]
- ↑ Respectivement dans la Méthodologie de la Critique de la raison pure et dans le Tractatus logico-philosophicus
- ↑
Ceci n'empêche naturellement pas la philosophie de faire usage de
connaissances et résultats établis grâce à l'expérimentation. Ceci est
vraie tout particulièrement de la philosophie de l'esprit.
Il n'empêche que, parmi les représentants de ce courant, aucun
n'effectue lui-même des expérimentations. En outre, si on compare
l'importance de l'expérimentation pour la physique et pour la
philosophie par exemple, on voit qu'on ne peut pas faire de la
philosophie une discipline expérimentale.
- ↑ Sur la logique de Leibniz voir l'ouvrage classique de Louis Couturat, La logique de Leibniz, réed. Olms, 1969
- ↑ Voir le Lachès ou le Protagoras par exemples.
- ↑ Voir la première Méditations métaphysiques
- ↑ Sur la conception de la philosophie comme création, voir Gilles Deleuze, Pourparlers, 1972-1990, Ed. de Minuit, 1990, p. 168)
- ↑ Dès l'Antiquité : voir le cinquième livre de l'Éthique à Nicomaque d'Aristote et à la célèbre distinction entre les différents sens du mot justice
- ↑ Pour des textes qui livrent des définitions classiques de la philosophie par des philosophes, voir entre autres : Le Banquet et l'Apologie de Socrate de Platon ; le dixième livre de l'Éthique à Nicomaque ; De la constance du sage de Sénèque ; le cinquième livre de l'Éthique de Spinoza
- ↑ Dialectique de la raison d'Adorno et Max Horkheimer et la Généalogie de la morale de Nietzsche
- ↑ Voir sur ce sujet Pierre Hadot, Qu'est-ce que la philosophie ?
- ↑ De la brièveté de l'âme de Sénèque, le Manuel d'Épictète, les Pensées pour moi-même de Marc-Aurèle
- ↑ Voir la correspondance avec Élisabeth et le Livre IV du Discours de la Méthode
- ↑ Voir les Livres IV et V de l'Éthique
- ↑ E. Brehier, La philosophie de Plotin, p.121, Éd. Vrin, ISBN : 978-2-7116-8024-5
- ↑ Une très bonne analyse des conditions et des intentions de ces traductions se trouvent dans l'ouvrage de Dimitri Gutas, Greek Thought, Arabic Culture, Routledge, 1998. Traduction française : Pensée grecque, culture arabe. Aubier, 2005. ISBN: 9782700734157.
- ↑ Tel Voltaire avec Frédéric II ou Diderot avec Catherine la Grande
- ↑ Voir le Prince
- ↑ Voir le Capital
- ↑ Voir Théorie et pratique du Bolchévisme de Russell par exemple
- ↑ Sur cette période voir : Histoire de la philosophie d'Émile Bréhier, Qu'est-ce que la philosophie antique de Pierre Hadot
- ↑ Clémence Ramnoux, Les Présocratiques, p.445, in Histoire de la philosophie publié par Brice Parain, Paris, 1969, (ISBN 2-07-040777-2)
- ↑ La République, Livre VI et VII
- ↑ Porphyre de Tyr, La Vie de Plotin
III, Éd. Belles Lettres : « Il arriva à posséder si bien la
philosophie, qu’il tâcha de prendre une connaissance directe de celle
qui se pratique chez les Perses, et de celle qui est en honneur chez
les Indiens. »
- ↑ Voir pour plus de détail, ce site [archive]
- ↑ Sur cette période voir les ouvrages d'Étienne Gilson: La philosophie au Moyen Âge, 2 volumes, Paris, 1922.
- ↑ C'est ce que des commentateurs comme Marie-Dominique Chenu appellent la renaissance du Moyen Âge (voir Introduction à l'étude de saint Thomas d'Aquin)
- ↑ Voir ce site pour de plus amples informations [archive]
- ↑ Sur cette période voir Pascal Engel, La dispute, une introduction à la philosophie analytique, Paris, Minuit, 1997, Scott Soames, Philosophical Analysis in the Twentieth Century, Volume 1 : The Dawn of Analysis, Princeton, 2003 et Philosophical Analysis in the Twentieth Century, Volume 2 : The Age of Meaning, Princeton, 2003
- ↑ Voir sur sujet Levinas, Théorie de l'intuition dans la phénoménologie de Husserl, Paris, 1930
- ↑ Les mots et les choses
- ↑ De la grammatologie
- ↑ Tels Hannah Arendt dans Les Origines du totalitarisme, traduits en trois volumes ; Carl Schmitt, La dictature, Seuil, Paris, 2000 (trad. par Mira Köller et Dominique Séglard) ; Raymond Aron, Démocratie et totalitarisme, éd. Gallimard, 1965.
- ↑ Sur la philosophie indienne voir Surendranath N. Dasgupta: A History of Indian Philosophy (cinq volumes), Cambridge, 1922 et A.K. Warder: Outline of Indian Philosophy, Delhi: Motilal Banarsidass, 1971. (ISBN 0-89581-372-6)
- ↑ Voir : L'Inde Classique, volume III de Louis Renou et Jean Filliozat, réimpression de l'École française d'Extrême-Orient, Paris, 1996
- ↑ Sur le bouddhisme voir : Samuel Bercholz et Sherab Chödzin Kohn, Pour comprendre le bouddhisme, Éd. Laffont, 1993, 428 p. (ISBN 2-266-07633-7) et Philippe Cornu, Dictionnaire encyclopédique du bouddhisme, Éd. Seuil, 2001, 841 p. (ISBN 2-02-036234-1)
- ↑ L’autre grande tradition dite du theravāda évite soigneusement toutes discussion métaphysique, ou philosophique abstraite, et se concentre sur les aspects méditationnels
- ↑ Sur le Taoïsme voir Marcel Granet, Trois études sociologiques sur la Chine, « Remarques sur le Taoïsme ancien [archive] », 1925 et La Pensée chinoise, 1934 (rééd. Albin Michel, coll. « L'Évolution de l’humanité [archive] », 1999) 1925, Henri Maspéro, Le Taoïsme et les Religions chinoises [archive], 1950, NRF (Gallimard), coll. « Bibliothèque des Histoires » (rééd. Gallimard, 1990)
- ↑ Isabelle Robinet, Histoire du taoïsme : des origines au XIVe siècle [archive]. Pour la Stanford Encyclopedia of Philosophy :
« Le taoïsme est un terme-parapluie qui recouvre un ensemble de
doctrines [philosophiques] qui ont en commun une orientation similaire.
Le terme taoïsme est également associé à différents courants
religieux naturalistes ou mystiques… Le résultat est que [c’]est un
concept essentiellement malléable. La fameuse question de Creel :
« Qu’est-ce que le taoïsme ? » reste toujours aussi difficile. » ([1] [archive] Voir l'article).
- ↑ Pierre-Richard Féray, Le Viêt-Nam, collection Que sais-je ?, cinquième édition, PUF
- Anonyme, le Mahâbhârata, en particulier le passage de la Bhagavad-Gîtâ
- Anonyme, le Rig-Veda
- Anonyme, le Yi Jing
- Thomas d'Aquin, Somme théologique
- Aristote, Éthique à Nicomaque
- Aristote, La Métaphysique
- Augustin, Les Confessions
- Yvon Belaval, Histoire de la philosophie, Gallimard
- Émile Bréhier, Histoire de la philosophie, PUF, Paris, 2004, (ISBN 2-13-054396-0)
- Barbara Cassin, (dir.), Vocabulaire européen des philosophies - Dictionnaire des intraduisibles, Seuil-Le Robert, 2004
- François Châtelet, Histoire de la philosophie
- Confucius, Entretiens de Confucius
- Henry Corbin, Histoire de la philosophie islamique, Gallimard, coll. Idées
- René Descartes, Discours de la méthode, (1637), Gallimard, Paris, 1991 (ISBN 2-07-032613-6)
- René Descartes, Méditations métaphysiques, (1641), Flammarion, Paris, 1993 (ISBN 2-08-070328-5)
- Epictète, Manuel
- Épicure, Lettres
- G.W.F. Hegel, Phénoménologie de l'esprit
- Martin Heidegger, Être et Temps, trad. Emmanuel Martineau, édition hors commerce
- Jeanne Hersch, L'étonnement philosophique, Gallimard, Paris, 1993 (ISBN 2-07-032784-1)
- Thomas Hobbes, Léviathan, trad. Gérard Mairet, Gallimard, Paris, 2000 (ISBN 2-07-075225-9)
- David Hume, Traité de la nature humaine
- Edmund Husserl, Idées directrices pour une phénoménologie pure et une philosophie phénoménologique
- André Jacob, (dir.), Encyclopédie Philosophique Universelle, PUF, Paris, 1992-1998
- Karl Jaspers, Introduction à la philosophie
- Karl Jaspers, Les grands philosophes
- Denis Kambouchner, (dir.), Notions de philosophie
- Emmanuel Kant, Critique de la raison pure, trad. Alain Renaut, Flammarion, Paris, 2001 (ISBN 2-08-071142-3)
- André Lalande, Vocabulaire technique et critique de la philosophie, PUF, Paris, 2002 (ISBN 2-13-053093-1)
- G.W. Leibniz, Monadologie, in Discours de métaphysique, Monadologie, dir. Michel Fichant, Gallimard, Paris, 2004 (ISBN 2-07-032964-X)
- Lucrèce, De rerum natura
- Maurice Merleau-Ponty, Éloge de la philosophie
- Friedrich Nietzsche, Ainsi parlait Zarathoustra
- Platon, Apologie de Socrate, trad. Luc Brisson, Flammarion, Paris, 1999 (ISBN 2-08-070848-1)
- Platon, La République, trad. George Leroux, Flammarion, Paris, 2002 (ISBN 2-08-070653-5)
- Plotin, Les Ennéades
- WVO. Quine, Le mot et la chose
- Fred Poché, Penser avec Arendt et Lévinas
- Jean-Jacques Rousseau, Du Contrat Social, LGF - Livre de poche, 1996 (ISBN 2-253-06725-3)
- Jean-Paul Sartre, L'existentialisme est un humanisme,
- Arthur Schopenhauer, Le monde comme volonté et comme représentation
- Baruch Spinoza, Éthique
- Wittgenstein, Ludwig, Tractatus logico-philosophicus, trad. Gilles-Gaston Granger, Gallimard, Paris, 2001, (ISBN 2-07-075864-8)
- Répertoires de sources philosophiques antiques :
Pour aller plus loin[modifier]
Sur les autres projets Wikimédia :
Articles connexes[modifier]